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ALLÉGORIES.

nous dépouillent. On négocie avec eux en marchands, et ils négocient en guerriers.

« Rien ne serait plus aisé que de réprimer leurs brigandages ; on ne le fait pas. Mais que de choses seraient utiles et aisées qui sont négligées absolument ! La nécessité de réduire ces pirates est reconnue dans les conseils de tous les princes, et personne ne l’entreprend. Quand les ministres de plusieurs cours en parlent par hasard ensemble, c’est le conseil tenu contre les chats.

« Les religieux de la rédemption des captifs sont la plus belle institution monastique ; mais elle est bien honteuse pour nous. Les royaumes de Fez, Alger, Tunis, n’ont point de marabous de la rédemption des captifs. C’est qu’ils nous prennent beaucoup de chrétiens, et nous ne leur prenons guère de musulmans.

« Ils sont cependant plus attachés à leur religion que nous à la nôtre : car jamais aucun Turc, aucun Arabe ne se fait chrétien, et ils ont chez eux mille renégats qui même les servent dans leurs expéditions. Un Italien, nommé Pelegini, était, en 1712, général des galères d’Alger. Le miramolin, le bey, le dey, ont des chrétiennes dans leurs sérails ; et nous n’avons eu que deux filles turques qui aient eu des amants à Paris[1].

« La milice d’Alger ne consiste qu’en douze mille hommes de troupes réglées ; mais tout le reste est soldat, et c’est ce qui rend la conquête de ce pays si difficile. Cependant les Vandales les subjuguèrent aisément, et nous n’osons les attaquer ! etc. »


ALLÉGORIES[2].


Un jour, Jupiter, Neptune et Mercure, voyageant en Thrace, entrèrent chez un certain roi nommé Hyrieus, qui leur fit fort bonne chère. Les trois dieux, après avoir bien dîné, lui demandèrent s’ils pouvaient lui être bons à quelque chose. Le bonhomme, qui ne pouvait plus avoir d’enfants, leur dit qu’il leur

  1. Dont l’une, Mlle Aïssé. — On signale encore, lors de la Révolution, une dame échappée du harem, à laquelle le roi avait accordé l’autorisation de tenir à Rueil une maison de jeu, et qui, après le 10 août, envoya à l’Assemblée législative son offrande patriotique. (G. A.)
  2. Mélanges, tome V, 1701. Le volume désigné sous le titre de tome V des Mélanges porte sur le frontispice : Seconde suite des Mélanges. Au reste, cette aventure est racontée par Ovide, Fastes, livre V, vers 495-535. Voyez l’article Ange, première section. (B.)