convoquer une assemblée à Léopol, telle à peu près que celle qui avait détrôné Auguste à Varsovie.
La Pologne avait alors deux primats, aussi bien que deux rois, l’un de la nomination d’Auguste, l’autre de celle de Stanislas. Le primat nommé par Auguste convoqua l’assemblée de Léopol, où se rendirent tous ceux que ce prince avait abandonnés par la paix d’Alt-Rantstadt, et ceux que l’argent du czar avait gagnés. On y proposa d’élire un nouveau souverain. Il s’en fallut peu que la Pologne n’eût alors trois rois, sans qu’on eût pu dire quel était le véritable.
Pendant les conférences de Léopol, le czar, lié d’intérêt avec l’empereur d’Allemagne, par la crainte commune où ils étaient du roi de Suède, obtint secrètement qu’on lui envoyât beaucoup d’officiers allemands. Ceux-ci venaient de jour en jour augmenter considérablement ses forces, en apportant avec eux la discipline et l’expérience. Il les engageait à son service par des libéralités ; et pour mieux encourager ses propres troupes, il donna son portrait enrichi de diamants aux officiers généraux et aux colonels qui avaient combattu à la bataille de Calish : les officiers subalternes eurent des médailles d’or ; les simples soldats en eurent d’argent. Ces monuments de la victoire de Calish furent tous frappés dans sa nouvelle ville de Petersbourg, où les arts florissaient à mesure qu’il apprenait à ses troupes à connaître l’émulation et la gloire.
La confusion, la multiplicité des factions, les ravages continuels en Pologne, empêchèrent la diète de Léopol de prendre aucune résolution. Le czar la fit transférer à Lublin. Le changement de lieu ne diminua rien des troubles et de l’incertitude où tout le monde était : l’assemblée se contenta de ne reconnaître ni Auguste, qui avait abdiqué, ni Stanislas, élu malgré eux ; mais ils ne furent ni assez unis ni assez hardis pour nommer un roi. Pendant ces délibérations inutiles, le parti des princes Sapieha, celui d’Oginski, ceux qui tenaient en secret pour le roi Auguste, les nouveaux sujets de Stanislas, se faisaient tous la guerre, pillaient les terres les uns des autres, et achevaient la ruine de leur pays. Les troupes suédoises, commandées par Levenhaupt, dont une partie était en Livonie, une autre en Lithuanie, une autre en Pologne, cherchaient toutes les troupes moscovites. Elles brûlaient tout ce qui était ennemi de Stanislas. Les Russes ruinaient également amis et ennemis ; on ne voyait que des villes en cendres et des troupes errantes de Polonais dépouillés de tout, qui détestaient également et leurs deux rois, et Charles XII, et le czar.