Trois puissants rois menaçaient ainsi l’enfance de Charles XII. Les bruits de ces préparatifs consternaient la Suède, et alarmaient le conseil. Les grands généraux étaient morts ; on avait raison de tout craindre sous un jeune roi qui n’avait encore donné de lui que de mauvaises impressions. Il n’assistait presque jamais dans le conseil que pour croiser les jambes sur la table ; distrait, indifférent, il n’avait paru prendre part à rien.
Le conseil délibéra en sa présence sur le danger où l’on était : quelques conseillers proposaient de détourner la tempête par des négociations ; tout d’un coup le jeune prince se lève avec l’air de gravité et d’assurance d’un homme supérieur qui a pris son parti. « Messieurs, dit-il, j’ai résolu de ne jamais faire une guerre injuste, mais de n’en finir une légitime que par la perte de mes ennemis. Ma résolution est prise : j’irai attaquer le premier qui se déclarera ; et, quand je l’aurai vaincu, j’espère faire quelque peur aux autres. » Ces paroles étonnèrent tous ces vieux conseillers ; ils se regardèrent sans oser répondre. Enfin, étonnés d’avoir un tel roi, et honteux d’espérer moins que lui, ils reçurent avec admiration ses ordres pour la guerre.
On fut bien plus surpris encore quand on le vit renoncer tout d’un coup aux amusements les plus innocents de la jeunesse. Du moment qu’il se prépara à la guerre, il commença une vie toute nouvelle, dont il ne s’est jamais depuis écarté un seul moment. Plein de l’idée d’Alexandre et de César, il se proposa d’imiter tout de ces deux conquérants, hors leurs vices. Il ne connut plus ni magnificence, ni jeux, ni délassements ; il réduisit sa table à la