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JUGEMENT DU CONNÉTABLE DE BOURBON.


ment à son mari, mais il en était héritier par d’anciens pactes de famille, observés dans tous les temps. Le droit de Charles de Bourbon était encore plus incontestable par son contrat de mariage, Charles et Susanne s’étant cédé mutuellement leurs droits, et les biens devant appartenir au survivant. Cet acte avait été solennellement confirmé par Louis XII, et paraissait à l’abri de toute contestation. Mais la mère du roi, régente du royaume pendant que son fils allait à la guerre d’Italie, étant outragée et toute-puissante, conseillée par le chancelier Duprat, ce grand auteur de plus d’une infortune publique, intenta procès devant le parlement de Paris, et eut le crédit de faire mettre en séquestre tous les biens du connétable.

Ce prince, d’ailleurs maltraité par François Ier, ne résista pas aux sollicitations de Charles-Quint ; il alla commander les armées de l’empereur, et fut le fléau de ceux qui l’avaient persécuté.

Aux nouvelles de la défection du connétable, le roi différa son voyage d’Italie. Il donna commission au maréchal de Chabanes, grand-maître de sa maison, au premier président du parlement de Normandie, et à un maître des requêtes, d’aller interroger les confidents du connétable, qui furent d’abord mis en prison.

Parmi ces confidents ou complices étaient deux évêques, celui d’Autun et celui du Puy. Un secrétaire du roi servit de greffier. C’est encore ici une marque évidente que les formalités changeaient selon les temps et selon les lieux.

Le reste de l’instruction fut fait par de nouveaux commissaires : Jean de Selve, premier président du parlement de Paris ; Jean Solat, maître des requêtes ; François de Loyne, président aux enquêtes ; Jean Papillon, conseiller.

Le roi ordonna, par des lettres réitérées, du 20 septembre, du 15 et du 20 octobre 1522, de faire le procès au connétable absent, et à ses complices emprisonnés.

Les quatre commissaires conseillèrent au roi de renvoyer l’affaire au parlement de Paris ; et le roi, par une lettre du 1er novembre, leur témoigna qu’il désapprouvait beaucoup ce conseil.

Ces commissaires instruisirent donc le procès des prisonniers à Loches. Mais enfin le roi, incertain de la manière dont il fallait juger deux évêques, et craignant de se commettre avec Rome, renvoya l’affaire au parlement de Paris. Il ne fut plus question des deux évêques, on n’en parla plus ; les laïques seuls furent condamnés : ils furent jugés au mois de janvier 1523, les uns à mort, les autres à d’autres peines. Le seigneur de Saint-Vallier, entre autres, fut condamné à perdre la tête, le 16 janvier 1523.