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qu’on leur ôtât ainsi l’exercice de la police générale du royaume, et le clergé souffrit impatiemment que l’autorité royale voulût pacifier les querelles de religion. Les animosités s’aigrirent de tous côtés.

Une place de supérieure dans l’hôpital des filles acheva d’allumer la discorde. L’archevêque voulut seul nommer à cette place ; le parlement de Paris s’y opposa, et le roi ayant jugé en faveur du prélat, le parlement cessa de faire ses fonctions et de rendre la justice : il fallut que le roi envoyât par ses mousquetaires, à chaque membre de ce tribunal, des lettres de cachet portant ordre de reprendre leurs fonctions, sous peine de désobéissance.

Les chambres siégèrent donc comme de coutume ; mais quand il fallut plaider, il ne se trouva point d’avocats. Ce temps ressemblait en quelque manière au temps de la Fronde ; mais, dépouillé des horreurs de la guerre civile, il ne se montrait que sous une forme susceptible de ridicule.

Ce ridicule était pourtant embarrassant. Le roi résolut d’éteindre par sa modération ce feu qui faisait craindre un incendie : il exhorta le clergé à ne point user de rigueurs dangereuses ; le parlement reprit ses fonctions.

(Février 1752) Mais, bientôt après, les billets de confession reparurent ; de nouveaux refus de sacrements irritèrent tout Paris. Le même curé de Saint-Étienne, trouvé coupable d’une seconde prévarication, fut mandé par le parlement, qui lui défendit, à lui et à tous les curés, de donner un pareil scandale sous peine de la saisie du temporel. Le même arrêt invita l’archevêque à faire cesser lui-même le scandale. Ce terme d’invitation paraissait entrer dans les vues de la modération du roi. L’archevêque, ne voulant pas même que la justice séculière eût le droit de lui faire une invitation, alla se plaindre à Versailles. Il était soutenu par un ancien évêque de Mirepoix, nommé Boyer, chargé du ministère de présenter au roi les sujets pour des bénéfices. Cet homme, autrefois théatin, puis évêque, et devenu ministre au département des bénéfices, était d’un esprit fort borné, mais zélé pour les immunités de l’Église ; il regardait la bulle comme un article de foi, et, ayant tout le crédit attaché à sa place, il persuada que le parlement touchait à l’encensoir. L’arrêt du parlement fut cassé ; ce corps fit des remontrances fortes et pathétiques.

Le roi lui ordonna de s’en tenir à lui rendre compte de toutes les dénonciations qu’on ferait sur ces matières, se réservant à lui-