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ÉCRIVAINS FRANÇAIS

riorité du théâtre français sur le grec, et la prodigieuse différence qui se trouve entre le Misanthrope et les Grenouilles. Mort en 1742[1].

Buffier (Claude), jésuite. Sa Mémoire artificielle est d’un grand secours pour ceux qui veulent avoir les principaux faits de l’histoire toujours présents à l’esprit. Il a fait servir les vers (je ne dis pas la poésie) à leur premier usage, qui était d’imprimer dans la mémoire des hommes les événements dont on voulait garder le souvenir. Il y a dans ses traités de métaphysique des morceaux que Locke n’aurait pas désavoués ; et c’est le seul jésuite qui ait mis une philosophie raisonnable dans ses ouvrages. Mort en 1737.

Bussy-Rabutin (Roger de Rabutin, comte de), né dans le Nivernois en 1618. Il écrivit avec pureté. On connaît ses malheurs et ses ouvrages. Ses Amours des Gaules passent pour un ouvrage médiocre dans lequel il n’imita Pétrône que de fort loin. La manie des Français a été longtemps de croire que toute l’Europe devait s’occuper de leurs intrigues galantes. Vingt courtisans ont écrit l’histoire de leurs amours, à peine lue des femmes de chambre de leurs maîtresses. Mort à Autun, en 1693.

Cailly (le chevalier de), qui n’est connu que sous le nom d’Aceilly, était attaché au ministre Colbert. On ignore le temps de sa naissance et de sa mort[2]. Il y a de lui un recueil de quelques centaines d’épigrammes, parmi lesquelles il y en a beaucoup de mauvaises, et quelques-unes de jolies. Il écrit naturellement, mais sans aucune imagination dans l’expression.

Calmet (Augustin), bénédictin, né en 1672. Rien n’est plus utile que la compilation de ses recherches sur la Bible. Les faits y sont exacts, les citations fidèles. Il ne pense point, mais en mettant tout dans un grand jour, il donne beaucoup à penser. Mort en 1757.

Calprenède (Gautier-Coste de La), né à Cahors[3] vers l’an 1612, gentilhomme ordinaire du roi. Ce fut lui qui mit les longs romans à la mode. Le mérite de ces romans consistait dans des aventures dont l’intrigue n’était pas sans art, et qui n’étaient pas impossibles quoiqu’elles fussent presque incroyables. Le Boiardo, l’Arioste, le Tasse, au contraire, avaient chargé leurs romans poétiques de fictions qui sont entièrement hors de la nature ; mais les charmes de leur poésie, les beautés innombrables de détail, leurs allégories

  1. Le 16 avril. Voyez, ci-après, l’article Longueval.
  2. Voltaire ajouta l’article de Cailly en 1752. Le Moréri de 1759 ne donne pas la date de sa naissance, et dit qu’il mourut avant 1674. De Cailly était né à Orléans en 1604.
  3. C’est-à-dire dans le diocèse de Cahors.