Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome14.djvu/137

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
117
DU SIÈCLE DE LOUIS XIV.

esprit. Son plus grand mérite fut de faire aimer les lettres et la vertu à ses disciples. Mort en 1741.

Puységur (Jacques de Chastenet, maréchal de). Il nous a laissé l’Art de la guerre, comme Boileau a donné l’Art poétique[1].

Quesnel (Pasquier), né en 1634, de l’Oratoire. Il a été malheureux, en ce qu’il s’est vu le sujet d’une grande division parmi ses compatriotes. D’ailleurs il a vécu pauvre, et dans l’exil. Ses mœurs étaient sévères comme celles de tous ceux qui ne sont occupés que de disputes. Trente pages changées et adoucies dans son livre auraient épargné des querelles à sa patrie ; mais il eût été moins célèbre. Mort en 1719.

Quinault (Philippe), né à Paris en 1636, auditeur des comptes, célèbre par ses belles poésies lyriques, et par la douceur qu’il opposa aux satires très-injustes de Boileau. Quinault était, dans son genre, très-supérieur à Lulli. On le lira toujours ; et Lulli, à son récitatif près, ne peut plus être chanté. Cependant on croyait, du temps de Quinault, qu’il devait à Lulli sa réputation. Le temps apprécie tout. Il eut part, comme les autres grands hommes, aux récompenses que donna Louis XIV, mais une part médiocre ; les grandes grâces furent pour Lulli. Mort en 1688.

N. B. Il est rapporté dans les Anecdotes littéraires[2] que Boileau, étant à la salle de l’Opéra de Versailles, dit à l’officier qui plaçait : Monsieur, mettez-moi dans un endroit où je n’entende point les paroles. J’estime fort la musique de Lulli, mais je méprise souverainement les vers de Quinault.

Il n’y a nulle apparence que Boileau ait dit cette grossièreté. S’il s’était borné à dire : « Mettez-moi dans un endroit où je n’entende que la musique, » cela n’eût été que plaisant, mais n’eût pas été moins injuste. On a surpassé prodigieusement Lulli dans tout ce qui n’est pas récitatif ; mais personne n’a jamais égalé Quinault.

Quincy (le marquis de), lieutenant général d’artillerie, auteur de l’Histoire militaire de Louis XIV. Il entre dans de grands détails, utiles pour ceux qui veulent suivre dans leur lecture les opérations d’une campagne. Ces détails pourraient fournir des exemples, s’il y avait des cas pareils ; mais il ne s’en trouve jamais, ni dans les affaires, ni dans la guerre. Les ressemblances sont tou-

  1. Cet article est dans l’édition de 1751. Le roi de Prusse n’a publié qu’en 1760 son Art de la guerre, poëme en six chants. Puységur, né à Paris en 1655, est mort en 1743. (B.)
  2. Par Raynal ; voyez page 47.