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CHAPITRE CLXXVIII.

reux à qui la fortune manqua toujours, privé de toutes les ressources sur lesquelles il devait compter. Il ne fut point secouru par son beau-père, le roi d’Angleterre, qui se refusa aux cris de sa nation, aux sollicitations de son gendre et aux intérêts du parti protestant, dont il pouvait être le chef ; il ne fut point aidé par Louis XIII, malgré l’intérêt visible qu’avait ce prince à empêcher les princes d’Allemagne d’être opprimés. Louis XIII n’était point alors gouverné par le cardinal de Richelieu. Il ne resta bientôt à la maison palatine et à l’union protestante d’Allemagne d’autres secours que deux guerriers qui avaient chacun une petite armée vagabonde, comme les Condottieri d’Italie : l’un était un prince de Brunsvick, qui n’avait pour tout État que l’administration ou l’usurpation de l’évêché d’Halberstadt ; il s’intitulait ami de Dieu, et ennemi des prêtres, et méritait ce dernier titre, puisqu’il ne subsistait que du pillage des églises ; l’autre, soutien de ce parti alors ruiné, était un aventurier, bâtard de la maison de Mansfeld, aussi digne du titre d’ennemi des prêtres que le prince de Brunsvick. Ces deux secours pouvaient bien servir à désoler une partie de l’Allemagne, mais non pas à rétablir le Palatin et l’équilibre des princes.

(1623) L’empereur, affermi alors en Allemagne, assemble une diète à Ratisbonne, dans laquelle il déclare que « l’électeur palatin s’étant rendu criminel de lèse-majesté, ses États, ses biens, ses dignités, sont dévolus au domaine impérial : mais que, ne voulant pas diminuer le nombre des électeurs, il veut, commande et ordonne, que Maximilien de Bavière soit investi de l’électoral palatin ». Il donna en effet cette investiture du haut du trône, et son vice-chancelier prononça que l’empereur conférait cette dignité de sa pleine puissance.

La ligue protestante, près d’être écrasée, fit de nouveaux efforts pour prévenir sa ruine entière. Elle mit à sa tête le roi de Danemark, Christiern IV. L’Angleterre fournit quelque argent ; mais ni l’argent des Anglais, ni les troupes de Danemark, ni Brunsvick, ni Mansfeld, ne prévalurent contre l’empereur, et ne servirent qu’à dévaster l’Allemagne. Ferdinand II triomphait de tout par les mains de ses deux généraux, le duc de Valstein et le comte Tilly. Le roi de Danemark était toujours battu à la tête de ses armées, et Ferdinand, sans sortir de sa maison, était victorieux et tout-puissant.

Il mettait au ban de l’empire le duc de Mockelbourg, l’un des chefs de l’union protestante, et donnait ce duché à Valstein, son général. Il proscrivait de même le duc Charles de Mantoue pour