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ANNALES DE L’EMPIRE.

Charles d’Anjou. Il semblerait que l’empereur n’eût pas dû accoutumer le pape à donner des royaumes ; cependant c’est ce qui le raccommoda avec lui. Il craignait plus la puissance de Venceslas que celle du pape. Il protége donc Charobert, et désole la Bohême avec une armée. Les auteurs disent que cette armée fut empoisonnée par les Bohémiens, qui infectèrent les eaux voisines du camp ; cela est assez difficile à croire.

1303. Ce qui achève de mettre l’empereur dans les intérêts de Boniface VIII, c’est la sanglante querelle de ce pape avec Philippe le Bel. Boniface, très-maltraité par ce monarque, et qui méritait de l’être, reconnaît enfin cet Albert, à qui il avait voulu faire le procès, pour roi légitime des Romains, et lui promet la couronne impériale pourvu qu’il déclare la guerre au roi de France.

Albert paye la complaisance du pape par une complaisance bien plus grande. Il reconnaît que « l’empire a été transféré des Grecs aux Allemands par le saint-siége ; que les électeurs tiennent leur droit du pape, et que les empereurs et les rois reçoivent de lui le droit du glaive ». C’est contre une telle déclaration que le comte palatin aurait dû faire des procédures.

Ce n’était pas la peine de flatter ainsi Boniface VIII, qui mourut le 12 octobre, échappé à peine de la prison où le roi de France l’avait retenu aux portes même de Rome.

Cependant le roi de France confisque la Flandre sur le comte Gui Dampierre, et demeure, après une sanglante bataille, maître de Lille, de Douai, d’Orchies, de Béthune, et d’un très-grand pays, sans que l’empereur s’en mette en peine.

Il ne songe pas davantage à l’Italie, toujours partagée entre les guelfes et les gibelins.

1304-1305. Ladislas, ce fils du respectable Venceslas, roi de Bohême et de la Pologne, est chassé de la Hongrie. Son père en meurt[1], à ce qu’on prétend, de chagrin, si les rois peuvent mourir de cette maladie.

Le duc de Bavière Othon se fait élire roi de Hongrie, et se fait renvoyer dès la même année. Ladislas, retourné en Bohême, y est assassiné. Ainsi voilà trois royaumes électifs à donner à la fois : la Hongrie, la Bohême, et la Pologne.

L’empereur Albert fait couronner son fils Rodolphe en Bohême

  1. Ce prince figure sous le nom de Venceslas le Jeune, dans le Catalogue chronologique des rois de Bohême. Quand il devint roi de Hongrie, il prit le nom de Ladislas. (Cl.)