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ANNALES
DE L’EMPIRE
DEPUIS CHARLEMAGNE.



INTRODUCTION


De toutes les révolutions qui ont changé la face de la terre, celle qui transféra l’empire des Romains à Charlemagne pourrait paraître la seule juste, si le mot de juste peut être prononcé dans les choses où la force a tant de part, et si les Romains furent en droit de donner ce qu’ils ne possédaient pas.

Charlemagne fut en effet appelé à l’empire par la voix du peuple romain même, qu’il avait sauvé à la fois de la tyrannie des Lombards et de la négligence des empereurs d’Orient.

C’est la grande époque des nations occidentales. C’est à ces temps que commence un nouvel ordre de gouvernement. C’est le fondement de la puissance temporelle ecclésiastique : car aucun évêque, dans l’Orient, n’avait jamais été prince et n’avait eu aucun des droits qu’on nomme régaliens. Ce nouvel empire romain ne ressemble en rien à celui des premiers Césars.

On verra dans ces Annales ce que fut en effet cet empire, comment les pontifes romains acquirent leur puissance temporelle, qu’on leur a tant reprochée, pendant que tant d’évêques occidentaux, et surtout ceux d’Allemagne, se faisaient souverains ; et comment le peuple romain voulut longtemps conserver sa liberté entre les empereurs et les papes qui se sont disputé la domination de Rome.

Tout l’Occident, depuis le ve siècle, était ou désolé ou barbare. Tant de nations, subjuguées autrefois par les anciens