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DE LÉON X, ET DE L’ÉGLISE.

s L’Église romaine et la grecque, sans cesse aux prises, avaient, par leurs querelles, ouvert les portes de Constantinople aux Ottomans. L’empire et le sacerdoce, toujours armés l’un contre l’autre, avaient désolé l’Italie, l’Allemagne, et presque tous les autres États. Le mélange de ces deux pouvoirs, qui se combattaient partout, ou sourdement ou hautement, entretenait des troubles éternels. Le gouvernement féodal avait fait des souverains de plusieurs évêques et de plusieurs moines. Les limites des diocèses n’étaient point celles des États. La même ville était italienne ou allemande par son évêque, et française par son roi : c’est un malheur que les vicissitudes des guerres attachent encore aux villes frontières. Vous avez vu la juridiction séculière s’opposer partout à l’ecclésiastique, excepté dans les États où l’Église a été et est encore souveraine : chaque prince séculier cherchant à rendre son gouvernement indépendant du siège de Rome, et ne pouvant y parvenir : des évêques tantôt résistant aux papes, tantôt s’unissant à eux contre les rois ; en un mot, la république chrétienne du rite latin unie presque toujours dans le dogme en apparence et à quelques scissions près, mais sans cesse divisée sur tout le reste.

Après le pontificat détesté, mais heureux, d’Alexandre VI, après le règne guerrier et plus heureux encore de Jules II, les papes pouvaient se regarder comme les arbitres de l’Italie, et influer