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LA FRANCE ET L’ANGLETERRE AU XIIe SIÈCLE.

munications, d’interdits, de troubles, et de guerres, si les papes alors avaient voulu se mêler d’une pareille affaire, dans laquelle ils sont entrés tant de fois !

Un descendant du conquérant Guillaume, Henri II, depuis roi d’Angleterre, déjà maître de la Normandie, du Maine, de l’Anjou, de la Touraine, moins difficile que Louis le Jeune, crut pouvoir sans honte épouser une femme galante qui lui donnait la Guienne et le Poitou. Bientôt après il fut roi d’Angleterre, et le roi de France en reçut l’hommage lige, qu’il eût voulu rendre au roi anglais pour tant d’États.

Le gouvernement féodal déplaisait également aux rois de France, d’Angleterre, et d’Allemagne. Ces rois s’y prirent presque de même, et presque en même temps, pour avoir des troupes indépendamment de leurs vassaux. Le roi Louis le Jeune donna des priviléges à toutes les villes de son domaine, à condition que chaque paroisse marcherait à l’armée sous la bannière du saint de son église, comme les rois marchaient eux-mêmes sous la bannière de saint Denis. Plusieurs serfs, alors affranchis, devinrent citoyens ; et les citoyens eurent le droit d’élire leurs officiers municipaux, leurs échevins, et leurs maires.

C’est vers les années 1137 et 1138 qu’il faut fixer cette époque du rétablissement de ce gouvernement municipal des cités et des bourgs. Henri II, roi d’Angleterre, donna les mêmes priviléges à plusieurs villes pour en tirer de l’argent, avec lequel il pourrait lever des troupes.

(1166) Les empereurs en usèrent à peu près de même en Allemagne. Spire, par exemple, acheta le droit de se choisir des bourgmestres, malgré l’évêque qui s’y opposa. La liberté, naturelle aux hommes, renaquit du besoin d’argent où étaient les princes ; mais cette liberté n’était qu’une moindre servitude, en comparaison de ces villes d’Italie, qui alors s’érigèrent en républiques.

L’Italie citérieure se formait sur le plan de l’ancienne Grèce. La plupart de ces grandes villes libres et confédérées semblaient devoir former une république respectable ; mais de petits et de grands tyrans la détruisirent bientôt.

Les papes avaient à négocier à la fois avec chacune de ces villes, avec le royaume de Naples, l’Allemagne, la France, l’Angleterre, et l’Espagne. Tous eurent avec les papes des démêlés, et l’avantage demeura toujours au pontife.

(1142) Le roi de France, Louis le Jeune, ayant donné l’exclusion à un de ses sujets, nommé Pierre la Châtre, pour l’évêché de Bourges, l’évêque, élu malgré lui, et soutenu par Rome, mit