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ÉTAT DE LA FRANCE AUX Xe ET XIe SIÈCLES.


Tandis que Louis, ce dernier roi du sang carlovingien, était prêt à finir, à l’âge de vingt-trois ans, sa vie obscure, par une maladie de langueur, Hugues Capet assemblait déjà ses forces ; et, loin de recourir à l’autorité d’un parlement, il sut dissiper avec ses troupes un parlement qui se tenait à Compiègne pour assurer la succession à Charles. La lettre de Gerbert, depuis archevêque de Reims, et pape sous le nom de Silvestre II, déterrée par Duchesne, en est un témoignage authentique[1].

Charles, duc de Brabant et de Hainaut, États qui composaient la Basse-Lorraine, succomba sous un rival plus puissant et plus heureux que lui : trahi par l’évêque de Laon, surpris et livré à Hugues Capet, il mourut captif dans la tour d’Orléans ; et deux enfants mâles qui ne purent le venger, mais dont l’un eut cette Basse-Lorraine, furent les derniers princes de la postérité masculine de Charlemagne. Hugues Capet, devenu roi de ses pairs, n’en eut pas un plus grand domaine.

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CHAPITRE XXXIX.


État de la france aux xe et xie siècles. Excommunication
du roi Robert.


La France, démembrée, languit dans des malheurs obscurs, depuis Charles le Gros jusqu’à Philippe Ier arrière-petit-fils de Hugues Capet, près de deux cent cinquante années. Nous verrons si les croisades qui signalèrent le règne de Philippe Ier, à la fin du XIe siècle, rendirent la France plus florissante. Mais dans l’espace de temps dont je parle, tout ne fut que confusion, tyrannie, barbarie, et pauvreté. Chaque seigneur un peu considérable faisait battre monnaie ; mais c’était à qui l’altérerait. Les belles manufactures étaient en Grèce et en Italie. Les Français ne pouvaient les imiter dans les villes sans liberté, ou, comme on a parlé longtemps, sans priviléges, et dans un pays sans union.

  1. Les lettres de Gerbert, intéressantes pour l’histoire du Xe siècle, ont été publiées par André Duchesne, dans le tome II de l’ouvrage intitulé Historiæ Francorum scriptores coœtani. Paris, 1636, in-folio. (E. B.)