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LE TEMPS PRESENT'

��M. JOSEPH LAFFIGHARD

��UE PI,t;SIIÎUHS ACADliMIKS.

��(1775)

��Dans un coin de mes bois, loin du bruit des cités, Mes tablettes en main, j'étais tenté d'écrire, En vers assez communs, d'utiles vérités Qu'à Paris on condamne, ou dont on aime à rire. De nos pédants fourrés j'esquissais la satire, Lorsque je vis de loin des filles, des garçons, Des vieillards, des enfants, qui dansaient aux chansons. Aux transports du plaisir ils se livraient en proie: J'étais presque joyeux de leur bruyante joie. J'en demandai la cause ; un d'eux me répondit : « Nous sommes tous heureux, à ce qu'on nous a dit. — Heureux ! c'est un grand mot. Il est vrai que peut-être Par vos travaux constants vous méritez de l'être. Virgile et Saint-Lambert ont quelquefois vanté A Mécène, à Beauvau, votre félicité; Mais ce sont, entre nous, des discours de poètes, De douces fictions, d'élégantes sornettes. Leurs vers étaient heureux, et vous ne l'étiez pas. Le bonheur nous appelle, et fuit devant nos pas : Sous le dais, sous le chaume, il trompe notre vie. C'est en vain qu'on a dit en pleine académie :

1. Cette pièce de vers fut envoyée à d'Argental le 12 septembre 1775. Cepen- dant les Mémoires secrets n'en parlent qu'à la date du 18 décembre, et l'intitulent le Temps présent, épître à Turgot. Il y a eu un auteur du nom de Laffichard ; il s'appelait Thomas, et non Joseph, et était mort en 1753. La première édition des OEuvres de Voltaire qui contienne le Temps présent est l'édition de Kehl, qui indique deux notes comme étant de Voltaire. (B.)

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