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l'J2 LA TACÏIOUE. >t^

Et tous les grands exploits ne sont pas de grands crimes.

Voiis-mêine, à ce qu'on dit, vous chantiez autrefois

Les généreux travaux de ce cher Béarnois;

Il soutenait le droit de sa naissance auguste :

La Ligue était coupable, Henri Quatre était juste.

Mais, sans vous retracer* les faits de ce grand roi.

Ne vous souvient-il plus du jour de Fontenoy,

Quand la colonne anglaise, avec ordre animée.

Marchait à pas comptés à travers notre armée ?

Trop fortuné badaud !... dans les murs de Paris

Vous faisiez, en riant, la guerre aux beaux esprits ;

De la douce Gaussin le centième idolâtre.

Vous alliez la lorgner sur les bancs du théâtre.

Et vous jugiez en paix les talents des acteurs.

Hélas ! qu'auriez-vous fait, vous, et tous les auteurs ;

Qu'aurait fait tout Paris, si Louis, en personne.

N'eût passé, le matin, sur le pont de Galonné;

Et si tous vos césars à quatre sous par jour

N'eussent bravé l'Anglais, qui partit sans retour?

Vous savez quel mortel, amoureux de la gloire-.

Avec quatre canons ramena la victoire.

Ge fut au prix du sang du généreux Grammont,

Et du sage Lutteaux^ et du jeune Graon,

Que de vos beaux esprits les bruyantes cohues

Gomposaient les chansons qui couraient dans les rues;

Ou qu'ils venaient gaîment, avec un ris malin,

Siffler Sémiramis, Mérope, et l'Orphelin.

Ainsi que le dieu Mars, Apollon prend les armes.

L'Église, le barreau, la cour, ont leurs alarmes.

Au fond d'un galetas, Glément et Savatier^

Font la guerre au bon sens sur des tas de papier.

1 . Variante :

Mais, sans plus retracer.

2. Richelieu : c'est à ce vers et au suivant que Voltaire fait allusion dans sa lettre du 10 décembre 1773. (B.)

3. Voltaire en a parle dans son Poëme de Fontenoy (tome VIII, page 387), et dans le Précis du Siècle de Louis XV.

4. Il y a ici, ce me semble, un petit anachronisme. La bataille de Fontenoy, achettie au prix du sang des Lutteaux, des Craon, etc., est de 1745. Sémiramis n'est que de 17i8 ; l'Orphelin de la Chine, de 17Ô5. (B.)

5. Voyez les notes sur le Dialogue de Pégase et du Vieillard. (Xote de Voltaire, 1775.) — Ci-après pages 197 et '201. (B.)

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