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[2i] LES CHEVAUX ET LES ANES, ETC. 133

Voilà Bathos monté sur son grison. Il veut courir. La Grèce était railleuse : Plus l'assemblée était belle et nombreuse, Plus on sifflait. Les Bathos en ce temps N'imposaient pas silence aux bons plaisants.

Profitez bien de cette belle histoire, Vous qui suivez les sentiers de la gloire; Vous qui briguez ou donnez des lauriers, Distinguez bien les unes des coursiers. En tout état et dans toute science, Vous avez vu plus d'un Bathos en France ; Et plus d'un âne a mangé quelquefois Au râtelier des coursiers de nos rois.

L'abbé Dubois, fameux par sa vessie, Mit sur son front, très-atteint de folie, La même mitre, hélas ! qui décora Ce Fénelon que l'Europe admira. Au Cicéron des oraisons funèbres ^ Sublime auteur de tant d'écrits célèbres, Qui succéda dans l'emploi glorieux De cultiver l'esprit des demi-dieux? Un théatin, un Boyer^. Mais qu'importe Quand l'arbre est beau, quand sa sève est bien forte, Qu'il soit taillé par Bénigne ou Boyer? De très-bons fruits viennent sans jardinier.

C'est dans Paris, dans notre immense ville. En grands esprits, en sots toujours fertile. Mes chers amis, qu'il faut bien nous garder Des charlatans qui viennent l'inonder. Les vrais talents se taisent, ou s'enfuient. Découragés des dégoûts qu'ils essuient. Les faux talents sont hardis, effrontés. Souples, adroits, et jamais rebutés. Que de frelons vont pillant les abeilles! Que de Pradons s'érigent en Corneilles ! Que de Gauchats' semblent des Massillons!

1. Bossuet.

2. Boyer, moine imbécile, que le cardinal de Fleury fit précepteur du dauphin, et désigna en mourant pour ministre de la feuille. Des dévotes lui avaient fait obtenir l'évêclié de Mirepoix, qu'il quitta en venant à la cour. Il ctaitjll'ennemi déclaré de toute espèce de mérite, et persécuta violemment M. de Voltaire. (K.)

3. Gauchat, mauvais auteur de quelques brochures. {Note de Voltaire, 1764.)

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