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H2 LE PAUVRE DIABLE.

Quel beau vernis brillait sur sa voiture!

Un petit peigne orné de diamants

De son cbignon surmontait la parure;

I/Inde à grands Irais tissul ses vêtements ;

L'argent brillait dans la cuvette ovale

Où sa peau blanche et ferme, autant qu'égale.

S'embellissait dans des eaux de jasmin.

A son souper, un surtout de Germain^

Et trente plats chargeaient sa table ronde

Des doux tributs des forêts et de l'onde.

Je voulus vivre en fermier général :

Que voulez-vous, hélas! que je vous dise?

Je payai cher ma brillante sottise,

En quatre mois je fus à l'hôpital.

« Voilà mon sort, il faut que je l'avoue. Conseillez-moi. — Mon ami, je te loue D'avoir enfin déduit sans vanité Ton cas honteux, et dit la vérité ; Prête l'oreille à mes avis fidèles. Jadis l'Egypte eut moins de sauterelles Que l'on ne voit aujourd'hui dans Paris De malotrus, soi-disant beaux esprits, Qui, dissertant sur les pièces nouvelles, En font encor de plus sifflables qu'elles : Tous l'un de l'autre ennemis obstinés, Mordus, mordants, chansonneurs, chansonnés-. Nourris de vent au temple de Mémoire, Peuple crotté qui dispense la gloire. J'estime plus ces honnêtes enfants Qui de Savoie arrivent tous les ans, Et dont la main légèrement essuie Ces longs canaux engorgés par la suie : J'estime plus celle qui, dans un coin. Tricote en paix les lias dont j'ai besoin ; Le cordonnier qui vient de ma chaussure Prendre à genoux la forme et la mesure, Que le métier de tes obscurs Frérons.

��joueurs de gobelets, de danseurs de corde, et de tout ce qui peut amuser la jeu- nesse. {Note de Voltaire, 1771.)

1. Voyez la note 2, page 80.

2. Variante :

Simés, sifflants

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