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JUGEMENTS SUR VOLTAIRE.

Quand Voltaire, comme auteur tragique, sentait et pensait dans le rôle d’un autre, il était admirable ; mais quand il reste dans le sien propre, il est persifleur et cynique. La même mobilité qui lui faisait prendre le caractère des personnages qu’il voulait peindre ne lui a que trop bien inspiré le langage qui, dans de certains moments, convenait à Voltaire.

Candide met en action cette philosophie moqueuse si indulgente en apparence, si féroce en réalité ; il présente la nature humaine sous le plus déplorable aspect, et nous offre pour toute consolation le rire sardonique qui nous affranchit de la pitié envers les autres, en nous y faisant renoncer pour nous-mêmes.

C’est en conséquence de ce système que Voltaire a pour but, dans son Histoire universelle, d’attribuer les actions vertueuses, comme les grands crimes, à des événements fortuits qui ôtent aux unes tout leur mérite et tout leur tort aux autres. (De l’Allemagne.)

Voltaire, dans ses tragédies, est plein de boursouflure, de clinquant, toujours faux, ne connaissant ni les hommes, ni les choses, ni la vérité, ni les grandeurs, ni les passions. Il est étonnant combien peu il supporte la lecture. Quand la pompe de la diction, les prestiges de la scène, ne trompent plus l’analyse ni le goût, alors il perd immédiatement mille pour cent. On ne croira qu’avec peine qu’au moment de la Révolution Voltaire eut détrôné Corneille et Racine. On s’était endormi sur les beautés de ceux-ci, et c’est au Premier Consul qu’est dû ce réveil...

La France est de la religion de Voltaire. (Mémorial.)