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Érise.

Ce double mariage est donc fait ?Oui, monsieur.

Le Marquis.

Je vous en donne ici ma parole d’honneur ;
N’avez-vous donc pas vu les débris de la noce ?

M. Duru.

Vous m’avez tous bien l’air d’aimer le fruit précoce,
D’anticiper l’hymen qu’on avait projeté.

Le Marquis.

Ne nous soupçonnez pas de cette indignité,
Cela ferait criant.

M. Duru.

Cela ferait criant.Oh ! la faute est légère.
Pourvu qu’on n’ait pas fait une trop forte chère,
Que la noce n’ait pas horriblement coûté,
On peut vous pardonner cette vivacité.
Vous paraissez d’ailleurs un homme assez aimable.

Érise.

Oh ! très fort.

M. Duru.

Oh ! très fort.Votre sœur est-elle aussi passable ?

Le Marquis.

Elle vaut cent fois mieux.

M. Duru.

Elle vaut cent fois mieux.Si la chose est ainsi,
Monsieur Duru pourrait excuser tout ceci.
Je vais enfin parler à sa mère, et pour cause…

Érise.

Ah ! gardez-vous-en bien, monsieur ; elle repose.
Elle est trop fatiguée ; elle a pris tant de soins…

M. Duru.

Je m’en vais donc parler à son fils.

Érise.

Je m’en vais donc parler à son fils.Encor moins.

Le Marquis.

Il est trop occupé.

M. Duru.

Il est trop occupé.L’aventure est fort bonne.
Ainsi, dans ce logis, je ne peux voir personne ?

Le Marquis.

Il est de certains cas où des hommes de sens
Se garderont toujours d’interrompre les gens.