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ACTE III, SCÈNE VI.

Et braver son destin qui ne pouvait l’abattre ; Mais je ne Tai point vu depuis qu’il est chargé De CBS indignes fers où vous l’avez plongé. On prépare pour lui la mort la plus sanglante ; Vous le voulez, madame, et vous serez contente ; Il ne vous reste ici qu’à terminer mon sort Avant d’avoir appris s’il vit ou s’il est mort.

ZULIME.

S’il est mort, je sais trop le parti qu’il faut prendre.

ATIDE.

Ah ! si vous le vouliez, vous pourriez le défendre. Madame : vous l’aimez, et je connais l’amour ; Vous périrez des coups dont il perdra le jour ; Et, quelque sentiment qu’un père Vous inspire, Le plus grand des forfaits est de trahir Ramire. Il n’eut jamais que vous et le ciel pour appui ; Et n’est-ce pas à vous d’avoir pitié de lui ? Quelques amis encore échappés au carnage Vendent bien cher leur vie, et marchent au rivage : Vous êtes mal gardée ; on peut les réunir.

ZULIME.

Et vous me commandez encor de vous servir ?

ATIDE.

Quand je vous l’ai cédé, quand, vous donnant ma vie, Je me suis immolée à votre jalousie. Quand j’osais en ces lieux vous presser à genoux De m’abandonner seule, et de suivre un époux, Puis-je encor mériter vos fureurs inquiètes ? Que vous faut-il ? parlez, cruelle que vous êtes ! Quel fruit recueillez-vous de toutes vos erreurs ? Et qoi peut contre moi vous irriter ?

ZULIME.

Vos pleurs, Votre attendrissement, votre excès de courage. Votre crainte pour lui, vos yeux, votre langage. Vos charmes, mon malheur, et mes transports jaloux ; Tout m’irrite, cruelle, et m’arme contre vous. Vous avez mérité que Ramire vous aime ; Vous me forcez enfin d’immoler pour vous-même Et l’amour paternel, et l’honneur de mes jours. Je vous sers, vous, madame ; il le faut, et j’y cours ; Mais vous me répondrez...