C’est en vain que j’ai cru triompher de moi-même ;
Je déteste mon crime, et je sens que je Taime.
Je n’y résiste plus : ce poison détesté.
Par mes tremblantes mains aujourd’hui rejeté,
De toutes les fureurs m’embrase et me déchire ;
Au bord de mon tombeau j’idolâtre Ramire.
Tel est dans les replis de ce cœur dévoré
Ce pouvoir malheureux de moi-même abhorré,
Que si, pour couronner sa lâche perfidie,
Ramire en me quittant eût demandé ma vie ;
S’il m’eût aux pieds d’Atide immolée en fuyant ;
S’il eût insulté même à mon dernier moment,
Je l’eusse aimé toujours, et mes mains défaillantes
Auraient cherché ses mains de mon sang dégouttant es.
Quoi ! c’est ainsi que j’aime, et c’est moi qu’il trahit !
Et c’est moi qui le perds ! c’est par moi qu’il périt !
Non... je le sauverai, le parjure que j’aime.
Dût-il me détester et m’en punir lui-même.
Mais Atide est aimée ^
SCÈNE VI.
ZULIME, ÂTIDE, amenée par des gardes.
ZULIME.
Ah 1 qu’est-ce que je voi ? Ma rivale à mes yeux ! Atide devant moi !
ATIDE.
Oui, madame, il est vrai, je suis votre rivale ; Le malheur nous rejoint, le destin nous égale : Je sens les mêmes feux, je meurs des mêmes coups ; Et Ramire est perdu pour moi comme pour vous.
ZULIME.
Avez-vous vu Ramire ?
ATIDE.
Oui, je l’ai vu combattre,
i. « L’impression, dit Voltaire, m’a fait apercevoir d’un défaut capital qui régnait dans cette pièce : c’est l’uniformité des sentiments de Théroine, qui disait toujours : j’aime ; c’est un beau mot, mais il ne faut pas le répéter trop souvent ; il faut quelquefois dire : je hais, n Voltaire essaya vainement de corriger ce défaut, le mot j’aime revint to :Jours. (G. A.)