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ACTE II, SCÈNE III. 5Î5

Non qu’à tant de beautés mon âme inaccessible Se fasse une vertu de paraître insensible ; Mais pour tous et pour moi j’aurais trop à rougir Si le sort de l’État dépendait d’un soupir ; Un sentiment plus digne et de l’un et de l’autre Doit gouverner mon sort, et commander au vôtre. Vos aïeux sont les miens, et nous les trahissons, Nous perdons l’univers, si nous nous divisons. Je puis vous étonner ; cet austère langage Effarouche aisément les grâces de votre âge ; Mais je parle aux héros, aux rois, dont vous sortez, A tous ces demi-dieux que vous représentez. Longtemps, foulant aux pieds leur grandeur et leur cendre, Usurpant un pouvoir où nous devons prétendre. Donnant aux nations ou des lois, ou des fers, Une femme imposa silence à l’univers. De sa grandeur qui tombe affermissez l’ouvrage ; Elle eut votre beauté, possédez son courage. L’amour à vos genoux ne doit se présenter Que pour vous rendre un sceptre, et non pour vous l’ôter. C’est ma main qui vous l’offre, et du moins je me flatte Que vous n’immolez pas à l’amour d’un Sarmate La majesté d’un nom qu’il vous faut respecter. Et le trône du monde où vous devez monter.

AZÉMA.

Reposez-vous, sur moi, sans insulter Arzace,

Du soin de maintenir la splendeur de ma race.

Je défendrai surtout, quand il en sera temps,

Les droits que m’ont transmis les rois dont je descends.

Je connais vos aïeux ; mais, après tout, j’ignore

Si parmi ces héros, que l’Assyrie adore,

Il en est un plus grand, plus chéri des humains.

Que ce même Sarmate, objet de vos dédains.

Aux vertus, croyez-moi, rendez plus de justice.

Pour moi, quand il faudra que l’hymen m’asservisse.

C’est à Sémiramis à faire mes destins.

Et j’attendrai, seigneur, un maître de ses mains.

J’écoute peu ces bruits que le peuple répète.

Échos tumultueux d’une voix plus secrète.

J’ignore si vos chefs, aux révoltes poussés,

De servir une femme en secret sont lassés ;

Je les vois à ses pieds baisser leur tête altière ;