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400 LA PRUDE.

Que les destins n’ont jamais captivées, Et qui se font un plaisir généreux De rechercher un ami malheureux, J’en connais peu ; partout le vice abonde. Un coffre-fort est le dieu de ce monde ; Et je voudrais qu’ainsi que mon vaisseau Le genre humain fût abîmé dans l’eau.

darmin. Exceptez-nous du moins de la sentence.

ADINE.

Le monde est faux, je le crois ; mais je pense Qu’il est encore un cœur digne de vous, Fier, mais sensible, et ferme, quoique doux, De vos destins bravant l’indigne outrage. Vous en aimant, s’il se peut, davantage : Tendre en ses vœux, et constant dans sa foi.

BLANFORD.

Le beau présent ! où le trouver ?

ADINE.

Dans moi.

BLANFORD.

Dans vous ! allez, jeune homme que vous êtes, Suis-je eii état d’entendre vos sornettes ? Pour plaisanter prenez mieux votre temps. Oui, dans ce monde, et parmi les méchants. Je sais qu’il est cncor des âmes pures Qui chériront mes tristes aventures. Je suis heureux, dans mon sort abattu ; Dorflsc au moins sait aimer la vertu.

ADINE,

Ainsi, monsieur, c’est de cette Dorflse

Que pour toujours je vois votre âme éprise ?

BLANFORD.

Assurément.

ADINE.

Et vous avez trouvé En sa conduite un mérite éprouvé ?

BLANFORD.

Oui.

DARMIN.

Feu mon frère, avant d’aller en Grèce, S’il m’en souvient, vous destinait ma nièce.