ACTE I, SCÈNE I. 397
ADINE.
Ce temps est long, ce temps me désespère. Dorûse trompe ! et Dorflse a su plaire !
DARMIN.
Mais, après tout, Blauford t’est-il si cher ?
ADINE.
Oui ; dès ce jour où deux vaisseaux d’Alger* Si vivement sur les flots l’attaquèrent, Ah ! que pour lui tous mes sens se troublèrent ! Dans mes frayeurs, un sentiment bien doux M’intéressait pour lui comme pour vous ; Et, courageuse, en devenant si tendre. Je souhaitais être homme, et le défendre. Songez-vous bien que lui seul me sauva, Quand sur les eaux notre vaisseau brûla ? Ciel ! que j’aimai ses vertus, son courage, Qui dans mon cœur ont gravé son image 1
DARMIN.
Oui, je conçois qu’un cœur reconnaissant
Pour la vertu peut avoir du penchant.
Trente ans à peine, une taille légère.
Beaux yeux, air noble, oui, sa vertu peut plaire :
Mais son humeur et son austérité
Ont-ils pu plaire à ta simplicité ?
ADINE.
Mon caractère est sérieux, et j’aime Peut-être en lui jusqu’à mes défauts même.
DARMIN.
11 hait le monde.
ADINE.
Il a, dit-on, raison.
DARMIN.
Il est souvent trop confiant, trop bon ; Et son humeur gâte encor sa franchise.
ADINE.
De ses défauts le plus grand, c’est Dorfise.
DARMIN.
Il est trop vrai. Pourquoi donc refuser
1. Dans Tanglais, ce n*est pas contre des vaisseaux d’Alger que le capitaine a combattu, mais contre des Hollandais. {Noie de Voltaire,)