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Mon coeur et mes Etats sont au rang des vaincus.
L'ingrat me promettait un brillant hyménée :
Il me trompait ; du moins il ne me trompe plus,
Il me laisse. Je meurs, et meurs abandonnée.

ARSINE
Il a trahi vingt rois ; il trahit vos appas :
Il ne connaît qu'une aveugle puissance.

LIDIE
Mais vers la Gloire il adresse ses pas :
Pourra-t-il sans rougir soutenir ma présence ?

ARSINE
Les tyrans ne rougissent pas.

LIDIE
Quoi ! tant de barbarie avec tant de vaillance !
O Muses ! soyez mon appui ;
Secourez-moi contre moi-même ;
Ne permettez pas que j'aime
Un roi qui n'aime que lui.

(Les bergers et bergères consacrés aux Muses sortent des antres du Parnasse, au son des instruments champêtres.)

LIDIE, aux bergers.
Venez, tendres bergers, vous qui plaignez mes larmes,
Mortels heureux, des Muses inspirés,
Dans mon coeur agité répandez tous les charmes
De la paix que vous célébrez.

LES BERGERS EN CHOEUR
Oserons-nous chanter sur nos faibles musettes,
Lorsque les horribles trompettes
Ont épouvanté les échos ?

UNE BERGERE
Que veulent donc tous ces héros ?
Pourquoi troublent-ils nos retraites ?

LIDIE
Au temple de la Gloire ils cherchent le bonheur.

LES BERGERS
Il est aux lieux où vous êtes ;
Il est au fond de notre coeur.

UN BERGER
Vers ce temple où la mémoire
Consacre les noms fameux,
Nous ne levons point nos yeux ;
Les bergers sont assez heureux