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AVERTISSEMENT.

196 LETTRE DE M. DE LA LINDELLE.

On a reproché au grand Racine d’avoir, dans AthcUie, fait dire à Mathan trop de mal de lui-même. Encore Hathan parle-t-il raisonnablement ; mais ici, c’est le comble de la folie de prétendre que de tout mettre en combustion soit l’art de régner : c’est l’art d’être détrôné, et on ne peut lire de pareilles absurdités sans rire. M. Maffei est un étrange politique.

En un mot, monsieur, l’ouvrage de Maffei est un très-beau sujet, et une très-mauvaise pièce. ïont le monde convient à Paris que la représentation n’en serait pas achevée, et tous les gens sensés d’Italie en font très-peu de cas. C’est trè&-vainement que l’auteur, dans ses voyages, n’a rien négligé pour engager les plus mauvais écrivains à traduire sa tragédie : il lui était bien plus aisé de payer un traducteur que de rendre sa pièce bonne.

REPONSE

A M. DE LA LINDELLE.

La lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire, monsieur, doit vous valoir le nom d’hypereritique, qu’on donnait à Scaliger. Vous me paraissez bien redoutable ; et si vous traitez ainsi M. Maffei, que n’ai-je point à craindre de vous ! J’avoue que vous avez trop raison sur bien des points. Vous vous êtes donné la peine de ramasser beaucoup de ronces et d’épines : mais pourquoi ne vous êtes-vous pas donné le plaisir de cueillir les fleurs ? Il y en a, sans doute, dans la pièce de M. Maffei, et que j’ose croire immortelles : telles sont les scènes de la mère et juJilvetle^FéQJt^dfi^^ Aïï. H me semble que ces morceaux sont bien touchants et bien pathétiques. Vous prétendez que c’est le sujet seul qui en fait la beauté ; mais, monsieur, n’était-^e pas le même sujet dans les autres auteurs qui ont traité la Mérope ? Pourquoi, avec les mêmes secours, n’ont-ils pas eu le même succès ? Cette seule raison. ne prouvet-elle pas que M. Maffei doit autant à son génie qu’à son sujet ?