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Ses remords, ma pitié, son aspect, son absence,
À mes sens déchirés font trop de violence.
Suivons ses pas.


Scène XI.

ZOPIRE, PHANOR.
Phanor.

Suivons ses pas.Lisez ce billet important
Qu’un Arabe en secret m’a donné dans l’instant.

Zopire.

Hercide ! Qu’ai-je lu ? Grands dieux ! votre clémence
Répare-t-elle enfin soixante ans de souffrance ?
Hercide veut me voir ! lui, dont le bras cruel
Arracha mes enfants à ce sein paternel !
Ils vivent ! Mahomet les tient sous sa puissance,
Et Séide et Palmire ignorent leur naissance !
Mes enfants ! Tendre espoir, que je n’ose écouter !
Je suis trop malheureux, je crains de me flatter.
Pressentiment confus, faut-il que je vous croie ?
Ô mon sang ! où porter mes larmes et ma joie ?
Mon cœur ne peut suffire à tant de mouvements ;
Je cours, et je suis prêt d’embrasser mes enfants.
Je m’arrête, j’hésite, et ma douleur craintive
Prête à la voix du sang une oreille attentive.
Allons. Voyons Hercide au milieu de la nuit ;
Qu’il soit sous cette voûte en secret introduit,
Au pied de cet autel, où les pleurs de ton maître
Ont fatigué les dieux, qui s’apaisent peut-être.
Dieux, rendez-moi mes fils ! dieux, rendez aux vertus
Deux cœurs nés généreux, qu’un traître a corrompus !
S’ils ne sont point à moi, si telle est ma misère,
Je les veux adopter, je veux être leur père.


FIN DU TROISIÈME ACTE.