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vingt brochures contre lui[1]. Monsieur, combien avez-vous de pièces de théâtre en France ? dit Candide à l’abbé ; lequel répondit : Cinq ou six mille. C’est beaucoup, dit Candide : combien y en a-t-il de bonnes ? Quinze ou seize, répliqua l’autre. C’est beaucoup, dit Martin.

Candide fut très content d’une actrice qui fesait la reine Élizabeth, dans une assez plate tragédie[2], que l’on joue quelquefois. Cette actrice, dit-il à Martin, me plaît beaucoup ; elle a un faux air de mademoiselle Cunégonde ; je serais bien aise de la saluer. L’abbé périgourdin s’offrit à l’introduire chez elle. Candide, élevé en Allemagne, demanda quelle était l’étiquette, et comment on traitait en France les reines d’Angleterre. Il faut distinguer, dit l’abbé : en province, on les mène au cabaret ; à Paris, on les respecte quand elles sont belles, et on les jette à la voirie quand elles sont mortes. Des reines à la voirie ! dit Candide. Oui vraiment, dit Martin ; monsieur l’abbé a raison ; j’étais à Paris quand mademoiselle Monime[3] passa, comme

  1. Dans l’édition de 1759, on lit : « … contre lui. Monsieur, lui dit l’abbé périgourdin, avez-vous remarqué cette jeune personne qui a un visage si piquant et une taille si fine ? Il ne vous en coûtera que dix mille francs par mois, et pour cinquante mille écus de diamants. Je n’ai qu’un jour ou deux à lui donner, répondit Candide, parceque j’ai un rendez-vous à Venise, qui presse. Le soir, après souper, l’insinuant Périgourdin redoubla de politesses et d’attentions. Vous avez donc, monsieur, lui dit-il, un rendez-vous à Venise, etc. » (Voyez page 306.) Le texte actuel existe dès 1761. B.
  2. C’est probablement le Comte d’Essex, tragédie de Thomas Corneille. (Note de M. Decroix.)
  3. Mademoiselle Lecouvreur.--Sur le refus de sépulture à mademoiselle Lecouvreur, en 1730, voyez, tome XII, la pièce intitulée : La Mort de mademoiselle Lecouvreur. B.