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ux royaumes s’étant conquis, l’on vit naître des empires d’une étendue gigantesque ; et dans cette agglomération, loin que la force interne des états s’accrût en raison de leur masse, il arriva, au contraire, qu’elle fut diminuée ; et loin que la condition des peuples fût rendue plus heureuse, elle devint de jour en jour plus fâcheuse et plus misérable, par des raisons sans cesse dérivées de la nature des choses… par la raison, qu’à mesure que les états acquirent plus d’étendue, leur administration devenant plus épineuse et plus compliquée, il fallut, pour remuer ces masses, donner plus


d’activité au pouvoir, et il n’y eut plus de proportion entre les devoirs des souverains et leurs facultés : par la raison, que les despotes, sentant leur faiblesse, redoutèrent tout ce qui développait la force des nations, et qu’ils firent leur étude de l’atténuer : par la raison, que les nations, divisées par des préjugés d’ignorance et des haines féroces, secondèrent la perversité des gouvernemens ; et que se servant réciproquement de satellites, elles aggravèrent leur esclavage : par la raison, que la balance s’étant rompue entre les états, les plus forts accablèrent plus facilement les faibles : enfin, par la raison, qu’à mesure que les états se concentrèrent, les peuples dépouillés de leurs lois, de leurs usages et des gouvernemens qui