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ur confia la balance pour peser les droits, et l’épée pour punir les transgressions. Alors s’établit entre les individus un heureux équilibre de forces et d’action, qui fit la sureté commune. Le nom de l’équité et de la justice fut reconnu et révéré sur la terre ; chaque homme pouvant jouir en paix des fruits de son travail, se livra tout entier aux mouvemens de son ame ; et l’activité, suscitée et entretenue par la réalité ou par l’espoir des jouissances, fit éclore toutes les richesses de l’art et de la nature ; les champs se couvrirent de moissons, les vallons de troupeaux, les coteaux de fruits, la mer de vaisseaux, et l’homme fut heureux et puissant sur la terre. Ainsi le désordre que son imprudence avait produit, sa propre sagesse le répara ; et cette sagesse en lui fut encore l’effet des lois de la nature dans l’organisation de son être. Ce fut pour assurer ses jouissances, qu’il respecta celles d’autrui ; et la cupidité trouva son correctif dans l’amour éclairé de soi-même. Ainsi l’amour de soi, mobile éternel de tout individu, est devenu la base nécessaire de toute association ; et c’est de l’observation de cette loi naturelle qu’a dépendu le sort de toute nation. Les lois factices et conventionnelles ont-elles tendu vers son but et rempli ses indications ? Chaque homme, mû d’un instinct puissant, a déployé toutes les facultés de son être ; et de la multitude des félicités particulières s’est composée la félicité publique. Ces lois, au contraire, ont-elles