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portée. Or, de ce premier fait en découle un second, également clair et digne de remarque. De ce que vous êtes d’accord sur ce que vous connaissez avec certitude, il s’en suit que vous n’êtes discordans que sur ce que vous ne connaissez pas bien, sur ce dont vous n’êtes pas assurés ; c’est-à-dire, que vous vous disputez, que vous vous qurellez, que vous vous battez pour ce qui est incertain, pour ce dont vous doutez. ô hommes ! Est-ce là la sagesse ? Et n’est-il pas alors démontré que ce n’est point pour la vérité que vous contestez ; que ce n’est point sa cause que vous défendez, mais celle de vos affections, de vos préjugés ; que ce n’est point l’objet tel qu’il est en lui, que vous voulez


prouver, mais l’objet tel que vous le voyez ; c’est-à-dire, que vous voulez faire prévaloir, non pas l’évidence de la chose, mais l’opinion de votre personne, votre manière de voir et de juger. C’est une puissance que vous voulez exercer, un intérêt que vous voulez satisfaire, une prérogative que vous vous arrogez ; c’est la lutte de votre vanité. Or, comme chacun de vous, en se comparant à tout autre, se trouve son égal, son semblable, il résiste par le sentiment d’un même droit. Et vos disputes, vos combats, votre intolérance sont l’effet de ce droit que vous vous déniez, de la conscience inhérente de votre égalité. Or, le seul moyen d’être d’accord est de revenir à la nature, et de prendre pour arbitre et régulateur l’ordre de choses qu’elle-même