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CHAPITRE XXII.

§ IV. Culte mystique et moral, ou système de l’autre monde.


« En effet, alors que le vulgaire entendit parler d’un nouveau ciel et d’un autre monde, il donna bientôt un corps à ces fictions ; il y plaça un théâtre solide, des scènes réelles ; et les notions géographiques et astronomiques vinrent favoriser, si même elles ne provoquèrent cette illusion.

« D’une part, les navigateurs phéniciens, ceux qui, passant les colonnes d’Hercule, allaient chercher l’étain de Thulé et l’ambre de la Baltique, racontaient qu’à l’extrémité du monde, au bout de l’Océan (la Méditerranée), où le soleil se couche pour les contrées asiatiques, étaient des îles fortunées, séjour d’un printemps éternel, et plus loin des régions hyperboréennes, placées sous terre (relativement aux tropiques), où régnait une éternelle nuit[1]. Sur ces récits mal compris, et sans doute confusément faits, l’imagination du peuple composa les Champs Élysées[2], lieux de délices placés dans un monde inférieur, ayant leur ciel, leur soleil, leurs astres ; et le Tartare, lieu de ténèbres, d’humidité, de fange, de frimas. Or, parce que l’homme, curieux de tout ce qu’il ignore et avide d’une longue existence, s’était

  1. Les nuits de six mois.
  2. Alitz, en phénicien ou hébreu, signifie dansant et joyeux.