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LES RUINES.

et tantôt comme multiple, tantôt comme active et tantôt comme passive, a toujours présenté à l’esprit humain une énigme insoluble. Tout ce qu’il peut y comprendre de plus clair, c’est que la matière ne périt point ; qu’elle possède essentiellement des propriétés par lesquelles le monde est régi comme un être vivant et organisé ; que la connaissance de ces lois, par rapport à l’homme, est ce qui constitue la sagesse ; que la vertu et le mérite résident dans leur observation ; et le mal, le péché, le vice, dans leur ignorance et leur infraction ; que le bonheur et le malheur en sont le résultat, par la même nécessité qui fait que les choses pesantes descendent, que les légères s’élèvent, et par une fatalité de causes et d’effets dont la chaîne remonte depuis le dernier atome jusqu’aux astres les plus élevés. Voilà ce qu’a révélé au lit du trépas notre Boudah Somona Goutama. »

À ces mots, une foule de théologiens de toute secte s’écrièrent que cette doctrine était un pur matérialisme ; que ceux qui la professaient étaient des impies, des athées, ennemis de Dieu et des hommes, qu’il fallait exterminer. — « Hé bien, répondirent les chamans, supposons que nous soyons en erreur ; cela peut être, car le premier attribut de l’esprit humain est d’être sujet à l’illusion ; mais de quel droit ôterez-vous à des hommes comme vous, la vie que le ciel leur a donnée ? Si