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CHAPITRE XXI.

quelques paroles ; quand, ayant proféré les mots indulgence, pouvoir du pape, grâce suffisante ou efficace, il fut interrompu par mille cris. C’est un abus horrible, dirent les luthériens, de prétendre, pour de l’argent, remettre les péchés. C’est une chose contraire au texte de l’Évangile, dirent les calvinistes, de supposer une présence véritable. Le pape n’a pas le droit de rien décider par lui-même, dirent les jansénistes : et trente sectes à la fois s’accusant mutuellement d’hérésie et d’erreur, il ne fut plus possible de s’entendre.

Après quelque temps, le silence s’étant rétabli, les musulmans dirent au législateur : Lorsque vous avez repoussé notre doctrine, comme proposant des choses incroyables, pourrez-vous admettre celle des chrétiens ? n’est-elle pas encore plus contraire au sens naturel et à la justice ? Dieu immatériel, infini, se faire homme ! avoir un fils aussi âgé que lui ! ce dieu-homme devenir du pain que l’on mange et que l’on digère ! avons-nous rien de semblable à cela ? Les chrétiens ont-ils le droit exclusif d’exiger une foi aveugle ? et leur accorderez-vous des privilèges de croyance à notre détriment ?

Et des hommes sauvages s’étant avancés : Quoi, dirent-ils, parce qu’un homme et une femme, il y a six mille ans, ont mangé une pomme, tout le genre humain se trouve damné, et vous dites Dieu juste ! quel tyran rendit jamais les enfants