Page:Volney - Œuvres choisies, Lebigre, 1836.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
103
CHAPITRE XVII.

« Mais observez qu’il en résultera une grande secousse dans vos habitudes, dans vos fortunes, dans vos préjugés. Il faudra dissoudre des contrats vicieux, des droits abusifs ; renoncer à des distinctions injustes, à de fausses propriétés ; rentrer enfin un instant dans l’état de la nature. Voyez si vous saurez consentir à tant de sacrifices. »

Alors, pensant à la cupidité inhérente au cœur de l’homme, je crus que ce peuple allait renoncer à toute idée d’amélioration.

Mais, dans l’instant, une foule d’hommes généreux et des plus hauts rangs, s’avançant vers le trône, y firent abjuration de toutes leurs distinctions et de toutes leurs richesses : « Dictez-nous, dirent-ils, les lois de l’égalité et de la liberté ; nous ne voulons plus rien posséder qu’au titre sacré de la justice.

« Égalité, justice., liberté, voilà quel sera désormais notre code et notre étendard. »

Et sur-le-champ le peuple éleva un drapeau immense, inscrit de ces trois mots, auxquels il assigna trois couleurs. Et l’ayant planté sur le siège du législateur, l’étendard de la justice universelle flotta pour la première fois sur la terre ; et le peuple dressa en avant du siège un autel nouveau, sur lequel il plaça une balance d’or, une épée et un livre, avec cette inscription :

à la loi égale, qui juge et protège.

Puis, ayant environné le siège et l’autel d’un