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CHAPITRE XV.

nous, et nos richesses viennent d’eux. Mais d’autres dirent avec orgueil : Ce serait une honte de nous confondre avec la foule, elle est faite pour nous servir ; ne sommes-nous pas la race noble et pure des conquérants de cet empire ? Rappelons à cette multitude nos droits et son origine.

les nobles.

Peuple ! oubliez-vous que nos ancêtres ont conquis ce pays, et que votre race n’a obtenu la vie qu’à condition de nous servir ? Voilà notre contrat social ; voilà le gouvernement constitué par l’usage et prescrit par le temps.

le peuple.

Race pure des conquérants ! montrez-nous vos généalogies ! nous verrons ensuite si ce qui, dans un individu, est vol et rapine, devient vertu dans une nation.

Et à l’instant, des voix élevées de divers côtés commencèrent d’appeler par leurs noms une foule d’individus nobles ; et, citant leur origine et leur parenté, elles racontèrent comment l’aïeul, le bisaïeul, le père lui-même, nés marchands, artisans, après s’être enrichis par des moyens quelconques, avaient acheté, à prix d’argent, la noblesse : en sorte qu’un très-petit nombre de familles étaient réellement de souche ancienne. Voyez, disaient ces voix, voyez ces roturiers par-