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CHAPITRE XII.

fut déployé ; et, chez les deux nations, les temples assiégés d’un peuple immense, m’offrirent un spectacle qui fixa mon attention. D’un côté, les Musulmans, assemblés devant leurs mosquées, se lavaient les mains, les pieds, se taillaient les ongles, se peignaient la barbe ; puis, étendant par terre des tapis, et se tournant vers le midi, les bras tantôt ouverts et tantôt croisés, ils faisaient des génuflexions et des prostrations ; et, dans le souvenir des revers essuyés pendant leur dernière guerre, ils s’écriaient : « Dieu clément, Dieu miséricordieux ! as-tu donc abandonné ton peuple fidèle ? Toi, qui as promis au Prophète l’empire des nations et signalé ta religion par tant de triomphes, comment livres-tu les vrais croyants aux armes des infidèles ? » et les Imans et les Santons disaient au peuple : « C’est le châtiment de vos péchés. Vous mangez du porc, vous buvez du vin ; vous touchez les choses immondes : Dieu vous a puni. Faites pénitence, purifiez-vous, dites la profession de foi[1], jeûnez de l’aurore au coucher, donnez la dîme de vos biens aux mosquées, allez à la Mekke, et Dieu vous rendra la victoire. » Et le peuple, reprenant courage, jetait de grands cris : Il n’y a qu’un Dieu, dit-il saisi de fureur, et Mahomet est son prophète : anathème à quiconque ne croit pas !…

  1. Il n’y a qu’un Dieu, et Mahomet est son prophète.