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PREMIÈRE PARTIE


ORTHOGRAPHE




CHAPITRE Ier

DE L’ORTHOGRAPHE AU XVIe SIÈCLE

Des deux systèmes d’orthographe, l’orthographe phonétique qui se modèle sur la voix, et l’orthographe étymologique qui s’attache plutôt à rappeler l’origine des mots, le moyen âge avait d’abord adopté le premier, n’acceptant en principe que les lettres vivantes et écrivant comme on prononce : « noces, tens, poin, devoir, doi, avoer, fame… » Mais les clercs, dont le latin était la langue habituelle, commencèrent de bonne heure à introduire dans le français la lettre étymologique, et écrivirent : « Nopces, temps, poing, debvoir, doigt, havoir, femme… » à cause des originaux latins : « nuptiæ, tempus, pugnus, debere, digitus, habere, femina… » — Toutefois ces nouvelles lettres n’influèrent en rien sur la prononciation.

À côté de l’abus, il y eut l’erreur : les lettres parasites se glissèrent même là où elles ne pouvaient se recommander de l’étymologie ; ainsi l s’implanta dans peult de potest, g dans ung de unus (accusat, unum), h dans autheur et authorité de auctorem, auctoritatem, … etc.

Vint le xvie siècle : on assista alors aux tournois les plus vifs à