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PRÉFACE

« Montaigne est un de ces sujets qui sont perpétuellement à l’ordre du jour en France », a dit Sainte-Beuve (Causeries du lundi, t. I, p. 49[1]).

C’est encouragé par ces quelques mots d’un de nos plus grands critiques contemporains, que je présente le résultat de mes études particulières sur Montaigne.

Ce génie ondoyant et divers, comme l’humanité qu’il représente, en voulant se peindre lui-même, a eu bien des admirateurs et aussi bien des détracteurs.

Loué par les uns, il a été vivement critiqué et blâmé par les autres. Mais jusqu’à présent on n’a guère étudié que le penseur, le philosophe tantôt railleur, tantôt sceptique ; on a laissé de côté l’écrivain ; on s’est souvent contenté d’idées toutes faites pour juger la langue des Essais ; parfois on a pris pour un jugement définitif de tout l’ouvrage cette phrase écrite un jour par l’auteur : « Que le gascon y arrive, si le françois n’y peut aller ! » De là on a conclu que c’est surtout le dialecte

  1. « Ce n’est pas seulement un classique, c’est une connaissance, et mieux que cela, c’est un voisin et un ami. Tous ceux qui travaillent à nous en rendre la lecture, non pas plus agréable, mais plus facile et plus courante, plus éclaircie jusque dans les moindres détails, sont sûrs de nous intéresser. » Lundis, I, 49.