Page:Voiture - Lettres, t. 1, éd. Uzanne, 1880.djvu/9

Cette page n’a pas encore été corrigée

égarer au milieu des ruelles ou dans le bel Empire des œillades si redoutable, pour y suivre ce roi des alcovistes, toujours tendre, spirituel et plaisant, qui poussa l'art des civilités enjouées jusqu’aux derniers confins de la plus aimable galanterie.

II

Vincent Voiture naquit à Amiens, place du Marché, dans le courant de Vannée i 598. Son père, riche marchand de vin en gros, suivait la cour dans ses pérégrinations. C’était, parait-il, un homme de bonne chère et fort aimé des grands, qu’il obligeait parfois de sa bourse, et auprès desquels il se prévalait de son rare mérite au jeu du piquet[1]

  1. « Le père de Voiture était un grand joueur de piquet, dit Tallemant ; on dit encore aujourd’hui qu’on a le quarré de Voiture quand on a soixante-six de point, parce que ce bonhomme croyait gaiement gagner quand il avait ce quarré. » On sait que ce ne fut qu’en 1629 que Louis XIII donna des armoiries au corps des marchands de vin de Paris, qui portèrent alors d’azur au navire d’argent surmonté de la bannière de France et accompagné de six petites nefs, de même à l’entour, avec une grappe de raisins de gueules en chef. Cette réunion de métaux et de couleurs rappelait les trois nuances des vins du pays : blanc, rouge et bleu. Voyez La Fizelière : Vins à la mode et cabarets du XVIIe siècle. Si Voiture hérita de son père la passion du