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étoit à prendre les voix, lorsque les tranchées reprirent à Potiron avec la plus grande violence ; les trois quarts des Conseillers tomberent dans la même crise, et l’on vit le plancher de la salle du Conseil couvert de Juges en convulsions, qui se culbutoient les uns contre les autres, et crioient à tue-tête. Potiron l’emportoit sur eux tous, et répétoit alternativement avec le chœur : Ah ! le ventre ! le ventre !

On voyoit les perruques et les bonnets carrés épars ; et cependant la plupart, quoique nu-tête comme des enfans de chœur, n’en étoient pas moins des têtes à perruque. Le Roi envoya chercher le grand Instituteur et son premier Médecin ; ils entrerent au Conseil, précédés de la Reine et des Fées. Sa Majesté fit le rapport de la maladie : le Docteur prétendit que la cause en étoit dans la région du foie ; mais la Fée Rusée le dépaysa, en lui disant : Plus bas, Docteur, plus bas. Elle avoua tout bonnement que c’étoit un tour de sa façon. J’ai parié, dit-elle, que je saurois tous ceux que les femmes joueroient à leurs maris, et j’ai jeté sur eux un charme qui leur donne la colique toutes les fois qu’on les attrape. C’est une petite plaisanterie de société.

Potiron ne put parler, à force de fureur ; il regarda fixement sa mere Rancune ; et après un