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CHAPITRE IX


Le bruit de cet événement répandu, le Roi des Patagons fit battre aux champs ; on publia le mariage de la Princesse et de Potiron : rien ne pouvoit le retarder. Le repas se fit ; on mangea plus qu’on ne parla ; on parla plus qu’on ne pensa. La chere fut fine, les plaisanteries furent grosses, l’ennui succéda, et le Roi, charmé de se bien divertir, dit, d’un ton malicieux, qu’il étoit temps de conduire les nouveaux mariés à leur appartement. Je fais grâce de la cérémonie. Le Prince parut bête, Tricolore parut triste ; tout cela étoit vrai. La Fée Rancune rioit comme rit la haine ; le grand Instituteur fit une belle exhortation ; mais ce n’est pas ce qu’il fera de mieux. Dès que les époux furent dans la chambre nuptiale, la belle Tricolore prit le déshabillé le plus galant ; mais, ce qui la rendoit encore plus charmante et plus désirable, c’étoit son embarras et sa rougeur : en pareille occasion, la pudeur est toujours en tribut à la volupté.

Potiron n’étoit pas si bien dans son bonnet de nuit. Il avoit cependant une belle robe de chambre couleur de chair. Le Roi crut que