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Voilà un honnête homme, dit Tricolore, qu’il faut loger aux Petites-maisons. Ne vous en moquez pas, interrompit le Roi ; voilà le style de la chose. Le grand Instituteur reprit son enthousiasme. Je vois encore, continua-t-il, d’autres événemens qui vous feront trembler, et qui sont pourtant des tant mieux. Tricolore, loin d’être intimidée, fut rassurée par ces paroles ; elle se flatta que le bonheur du Prince Discret serait peut-être un de ces tant mieux-là. L’homme divin le conjectura sur sa physionomie, et prononça ces mots terribles :

Je sais ce que vous pensez ; mais, ô Princesse ! que vous vous abusez ! vous donnerez la mort à votre Amant, et ce sera tant mieux pour lui. Ô ciel ! s’écria Tricolore, cela se pourroit-il ? Mais, dit Potiron, cela ne laisse pas que de faire un joli caractere : si elle traite ainsi un Amant, jugez de l’accueil qu’elle fera à son mari. Son mari, reprit le Prophete, en sera quitte pour la colique. Ah ! je ne balance plus, repartit Potiron, elle sera ma femme. Ah ! Fée Rusée ! poursuivit la Princesse en criant de toutes ses forces, ah ! Fée Rusée ! le souffrirez-vous ? Ah ! Fée Rusée, secourez-moi. La Fée Rusée écoutoit finement à la porte avec Monsieur son fils. Elle parut sur le champ, marmotta quelques