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CHAPITRE IV

Qui ne dit pas grand’chose.


Le grand Instituteur habitoit depuis quelque temps avec une Fée qui ne lui faisoit point payer de loyer, mais qui ne le logeoit pas pour rien. Cette Fée étoit une petite vieille, qui avoit le visage frais, l’esprit serein, et l’âme jeune ; elle renfermoit ses passions, et faisoit parade de ses goûts ; elle les avoit tous. Elle applaudissoit aux Opéra François, et ne donnoit que des Concerts Italiens. Elle avoit deux Cuisiniers ; l’un étoit pour la vieille cuisine, et l’autre pour la nouvelle : le premier étoit pour le dîner des Savans, et l’autre pour donner à souper à des jolies femmes. Elle ne sortoit que pour le Spectacle ; elle n’alloit dans aucune maison, mais la sienne étoit toujours ouverte : elle étoit persuadée qu’on ne doit point chercher le tourbillon, lorsqu’on n’est plus dans l’âge d’y pouvoir jouer un rôle ; mais qu’il faut l’attirer chez soi, pour en juger les personnages. Elle aimoit à raisonner le matin avec les gens d’esprit, à se dissiper le soir avec de la jeunesse. Elle se garantissoit de l’ennui, dès qu’elle voyoit qu’on s’amusoit ; et