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les missionnaires sont bannis, leurs églises démolies, les chrétiens japonais ont à choisir entre l’apostasie et la mort.

Alors seulement on put voir jusques en quelles profondeurs la foi avait jeté ses racines dans l’âme de ces hommes hier encore païens. Certes, les défections furent nombreuses ; mais que de grands exemples dignes de l’antiquité chrétienne. Plutôt que de renier leurs nouvelles croyances on vit des multitudes de Japonais prendre, sans faiblir, les chemins de l’exil ou celui du bûcher. Un jour, soixante-treize seigneurs abandonnent leurs biens et leur famille et s’en vont dans la province déserte de Tsugaru mourir de faim et de froid ; un autre, c’est plus de mille chrétiens qui, plus heureux, sont expédiés en terre espagnole, tandis qu’une foule innombrable, des enfants, des femmes, des pauvres, des ouvriers sont brûlés vif ou tués par le glaive. Toutes les provinces offrent bientôt leur contingent de martyrs : Nagasaki, Omura, Hirado, Shimabara semblent se dépeupler tant le nombre des chrétiens massacrés fut considérable. Partout les prisons s’emplissent de victimes qui meurent par groupes de vingt, cinquante, cent, joyeuses d’aller voir le ciel, fières de rendre témoignage de leur foi par le sacrifice de leur vie. Bientôt les supplices ordinaires ne suffisent plus aux bourreaux. Il faut qu’à leur tour, ils imitent, sans le savoir, la cruauté des persécuteurs d’autrefois, tant