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midi.

dans un petit jardin montueux, tout égayé de soleil parmi les iris et les roses. Sur la haie de jeunes cyprès qui cache le mur du fond, les rosiers grimpants enlacent de leurs guirlandes les sombres quenouilles ; je ne l’avais remarquée nulle part, cette alliance inattendue des fleurs souriantes, intimidées de leur hardiesse sur les arbres funéraires, plus roses et plus souriantes dans ce feuillage de deuil. — Elle était là, seule, vêtue d’une étoffe blanche, les mains croisées sur les genoux, assise sur un banc de marbre au pied des cyprès. Des corolles défleurissantes neigeaient sur ses cheveux nus ; ils ceignaient le front d’un large voile de soie lumineuse, prisme jouaient les rayons qui filtraient à travers la haie noire. Le regard perdu dans la clarté lointaine, au delà des étangs morts qui vont vers la mer, elle suivait au ciel des îles la fuite des foulées de nuages. Elle ne faisait rien ; pas de livre, pas d’ouvrage de main à ses côtés ; immobile, blanche statue de l’attente, elle semblait réfugiée quelque part en dehors du temps et du monde.

Quand elle se retourna au bruit de mon pas, je ne vis ni surprise ni mouvement sur ses traits ; elle me reçut d’un air naturel,