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jean d’agrève.

nous reverrons bientôt. Je t’attends prochainement à Port-Saïd ou à Suez : ce sera bien le diable si le bateau que tu commandes ne fait pas route par le canal. Adieu, mon Jean : que l’île déserte te conserve heureux !

Je le regardai affectueusement au fond des yeux. Crut-il à une ironie dans les miens ? Il se détourna avec un imperceptible mouvement de contrariété.

— Mais non, au revoir… à tout à l’heure !

Je hélai Savéû. Le Souvenir démarra. Nous étions loin du cuirassé, quand un canot blanc nous rejoignit, évita notre arrière sur l’eau déjà sombre, nous dépassa de toute la vitesse de ses six avirons. L’embarcation portait les deux dames avec d’Agrève. Il avait renvoyé le maître timonier et pris galamment la place de cet homme à la barre. Au passage de mon ami, je le saluai d’un geste et d’une parole, bord à bord. Il ne me vit pas, ne m’entendit pas : ses yeux étaient rivés sur une petite main qui balançait en jouant la poignée du gouvernail.

— Couvre-toi, Hélène, le temps fraîchit, dit la voix de la vieille dame.

Jean se leva pour aider celle qu’on appelait Hélène à passer un manteau. Dans le mou-