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jean d’agrève.

Le lendemain matin, Jean m’introduisit chez quelques-uns de ses amis. Vous les verrez reparaître dans ses confidences : je vous présente seulement les principaux de l’île, ceux dont la physionomie se ranime en ma mémoire, quand leurs noms et leurs propos reviennent dans les Quarts de nuit.

C’était César Cordélio, le boulanger : figure falote, nez taillé en récif sous deux petits yeux clignotants. On ne lui eût pas donné la moitié de son âge avancé ; il n’avait jamais ressenti une infirmité. — Informe-toi de sa santé, me dit Jean. Et l’homme de me répondre aussitôt, d’un ton mécontent : « Trop bonne, monsieur, trop bonne ; je voudrais bien une petite maladie, pour laisser reposer ma santé, afin qu’elle ne tourne pas tout d’un coup. » — Je demande chaque jour à cet animal comment il se porte, reprit mon ami, et chaque fois il me fait la même réponse. Il a une idée fixe, laisser reposer sa santé.

C’était Zourdan, vieillard à tête hirsute, au type étranger. Dalmate d’origine, et, de son ancienne profession, pandour au service de l’Autriche, Zourdan déserta le soir de Sadowa ; il passa l’Elbe à la nage. — Comment il est venu s’échouer ici, ajoutait d’Agrève, bien fin