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mains et les yeux levés vers le Christ, elle éclata d’une voix déchirante :

« – Christ sauveur, sauve-moi ! Seigneur, aie pitié de ta servante et de ses enfants ! aie pitié ! »

Entraînés par l’exemple et par les paroles consacrées, tous les paysans se levèrent d’un même mouvement, se prosternèrent sur le plancher et se signèrent pieusement.

Je ne vous décrirai pas le moment de stupeur qui suivit cette scène. Les juges et les seigneurs demeurèrent immobiles, interdits ; nul ne fit un geste, ne dit un mot ; le silence fut tel que j’entendais de ma place, je m’en souviens très bien, le balancier de la grosse horloge, battant sous le crucifix, comme la mesure de la justice éternelle. Ce fut cette horloge qui rompit le silence ; elle frappa les douze coups de midi. On écouta jusqu’au bout le timbre rauque et grave ; tous