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ici. Je renonce à vous dépeindre la tristesse et l’abattement qui ont remplacé, dans mon esprit, la confiance des premières heures.

Oh ! l’horrible et stupide chose que la guerre ! De loin, elle m’apparaissait comme un holocauste magnifique ; de près, je la vois ce qu’elle est en réalité, une boucherie inepte. La guerre déchaîne la bête sauvage qui est en nous ; l’égoïsme et la férocité se donnent joyeusement carrière. Je m’étais figuré qu’ici, du moins, l’injustice sociale était atténuée par l’abnégation commune ; nulle part elle ne blesse davantage les yeux ; les petits sont sacrifiés cyniquement à l’ambition des grands, à des rivalités vaniteuses, à des intrigues inavouées. Ces Bulgares que nous venons délivrer paraissent beaucoup plus heureux que notre peuple ; ils nous reçoivent froidement, nous regardent mourir avec